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Muhammad Sherzad, bénéficiaire d'une clause d'insertion, et Isabelle Guérin, coordinatrice emploi insertion, Grand Paris Sud Est Avenir © ANRU

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Clauses d'insertion : un tremplin vers l'emploi

Les clauses sociales prévues dans les marchés publics par les conventions ANRU confirment chaque année leur utilité au service de l’insertion des habitants en difficulté face à l’emploi. Mais cette utilité est le fruit d’une démarche volontariste, qui mise sur un accompagnement continu de l’ensemble des acteurs. Illustration sur le territoire de Grand Paris Sud Est Avenir.

Vu dans en villes, le mag de l'anru

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Il y a quinze ans, l’ANRU devenait pionnière en termes d’obligation de résultat en matière d’insertion grâce à l’adoption de la Charte Nationale d’Insertion dans le cadre du PNRU. Un bilan lors de l’Enquête Sociale de 2016 a permis de révéler que cette charte avait généré 25,2 millions d’heures d’insertion, réalisées par plus de 63000 bénéficiaires partout en France.

« Sur le territoire de Grand Paris Sud Est Avenir (GPSEA), cinq opérations de rénovation urbaine ont vu le jour dans le cadre du PNRU : à Alfortville, Bonneuil-sur-Marne, Créteil et Limeil-Brévannes, indique Isabelle Guérin, coordinatrice emploi insertion au sein de l’établissement public territorial (EPT). Sur l’ensemble du périmètre, 17 donneurs d’ordre ont mis en place des clauses sociales d’insertion, pour un total de 228 000 heures réalisées par 560 bénéficiaires. »


Les clauses d’insertion engagent les entreprises titulaires d’un contrat à consacrer à l’insertion professionnelle des habitants éloignés de l’emploi un minimum de 5% des heures travaillées dans opérations financées par l’ANRU et 10% dans le cadre de la gestion urbaine de proximité.

Mobilisation des acteurs


Dans la pratique, le mécanisme nécessite la mobilisation et la coordination de nombreux acteurs. Pour les seize villes de Grand Paris Sud Est Avenir, c’est l’association Pôle Compétences Initiatives (PCI) qui se charge, sous la conduite stratégique de l’EPT, de la mise en oeuvre opérationnelle et du suivi des clauses sociales dans les marchés publics. Facilitatrice au sein de PCI, Latifa Mazza est à la fois le chef d’orchestre et la cheville ouvrière du dispositif.

« Ma mission consiste à assurer l’interface entre les donneurs d’ordre, les entreprises attributaires des marchés, les prescripteurs comme Pôle emploi, les missions locales, les centres sociaux, les différentes structures locales de l’insertion par l’activité économique (IAE)… sans oublier les habitants du territoire qui pourraient potentiellement bénéficier de ces clauses sociales »

Au quotidien, le travail des facilitateurs va du calibrage de l’insertion sur les marchés avec les acheteurs au suivi de trajectoires des bénéficiaires, en passant bien sûr par la recherche des candidats.  


Par ailleurs, les objectifs d’insertion des programmes de l’ANRU sont principalement destinés aux habitants des quartiers prioritaires.

« Cela m’amène parfois à tenir des permanences dans les quartiers pour aller à la rencontre des candidats potentiels, poursuit Latifa Mazza. Mon objectif : que l’entreprise puisse embaucher un candidat. 

Pour cela, trois possibilités lui sont offertes : soit par une embauche directe de demandeurs d’emploi ; soit par la mutualisation des heures d’insertion en ayant recours à une ETTI (entreprise de travail temporaire d’insertion), un GEIQ (groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification) ou une AI (association intermédiaire) ; soit en sous-traitant une partie du marché à une entreprise d’insertion.

Du « quanti » au « quali »

Latifa Mazza tient également à ce que les heures passées par le bénéficiaire sur un chantier mènent à une insertion durable dans l’emploi. Plusieurs « belles histoires » encouragent la facilitatrice à poursuivre ses efforts, comme celle de ce quadragénaire qui a enchaîné les contrats d’intérim d’insertion avant d’être embauché en CDI par une filiale de la SNCF, ou celle de cet étudiant étranger qui a pu passer un diplôme de topographie en alternance. « Ces issues favorables ne sont pas encore suffisamment courantes, c’est pourquoi nous nous attachons désormais à aborder les clauses d’insertion sous un angle essentiellement qualitatif, remarque la facilitatrice. Il ne s’agit plus de faire “du chiffre” mais bien de proposer des parcours qualifiants aux bénéficiaires. Cela nous amène par exemple à imputer un maximum d’heures “clausées” aux lots les plus intenses en temps de travail, comme le gros oeuvre. Ou encore à travailler en réseau avec les territoires environnants pour permettre à nos bénéficiaires de basculer rapidement sur d’autres chantiers et maximiser leurs chances de trouver un emploi durable. Ce sont là des leviers que nous actionnerons le plus possible dans le cadre des opérations du NPNRU. »

Cinq nouveaux projets de renouvellement urbain sont programmés sur GPSEA, à Alfortville, Bonneuil-sur-Marne, Chennevières-sur-Marne, Créteil et Boissy-Saint-Léger/Limeil- Brévannes. 236 000 heures d’insertion sont prévues pour les trois projets déjà conventionnés.

Isabelle Guérin, Coordinatrice emploi insertion, Grand Paris Sud Est Avenir

La commande publique est un levier pour l'insertion

« Pour les communes membres de Grand Paris Sud Est Avenir, la dynamique impulsée depuis 2009 dans le cadre des premières opérations de rénovation urbaine a servi de révélateur. Le bilan favorable des clauses d’insertion a en effet permis de comprendre l’effet levier que pouvait représenter la commande publique pour le développement de l’insertion et de l’accès à l’emploi des personnes en difficultés sociales et professionnelles de notre territoire. Ces dernières années, le mouvement impulsé par la charte d’insertion ANRU s’est progressivement élargi aux achats hors rénovation urbaine des bailleurs sociaux du territoire et à d’autres donneurs d’ordres publics et privés, notamment l’AP-HP, le Conseil régional, le SMER (syndicat mixte d’études et de réalisation) de la TégéVal, le ministère de la Justice et la Société du Grand Paris. Et en décembre dernier, les ordonnateurs du territoire, communes et EPT en tête, ont décidé de franchir un cap supplémentaire à travers l’adoption d’une charte des achats socialement responsables qui inscrit les signataires dans une dynamique partenariale et une logique de fonctionnement harmonisé. Avec, en ligne de mire, la mise en oeuvre d’un dispositif efficace et lisible pour l’ensemble des parties prenantes».

 


Muhammad Sherzad, bénéficiaire d'une clause d'insertion

Un tremplin pour construire mon avenir

« J’ai 23 ans et suis arrivé en France en 2017 après un long périple en Europe depuis l’Afghanistan, que j’ai quitté alors que je venais de commencer mes études. J’habite aujourd’hui Limeil-Brévannes. Il y a un peu plus d’un an j’ai eu la chance de rencontrer Janus, une entreprise spécialisée dans le travail temporaire d’insertion. Grâce à eux, j’ai déjà pu travailler sur trois chantiers. J’ai ainsi eu l’occasion de travailler comme manoeuvre sur des chantiers du Grand Paris Express et de la SNCF. Et surtout j’ai été employé une dizaine de mois en tant qu’aide plombier sur un chantier de construction pour Créteil Habitat dans le cadre du Programme National pour la Rénovation Urbaine. Cette mission m’a beaucoup intéressé et j’aimerais bientôt pouvoir suivre une formation le domaine de la plomberie afin d’en faire mon métier. Le fait de travailler avec Janus m’a permis d’envisager de construire mon avenir ! »

 

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